Revue d'histoire de la Shoah

Le génocide des Arméniens, perpétré sur le territoire de l'empire ottoman, avait été ourdi depuis plusieurs décennies. Le Parti jeune-turc (Comité Union et Progrès) passe à l'action à la faveur du déclenchement de la Grande Guerre au côté des puissances centrales. Ces documents montrent que, depuis longtemps, en Turquie, flottait dans l'air l'idée de « liquider la question arménienne en liquidant les Arméniens » pour reprendre les mots d'un responsable turc. Sans compter que pour les milieux nationalistes jeunes-turcs, la charia était incompatible à la notion moderne d'égalité civique. Parallèlement, le Comité Union et Progrès avait mis sur pied en 1911 une organisation spéciale (O.S.) chargée des basses besognes. C'est elle qui, à partir du mois d'avril 1915, entreprend l'extermination.

Le processus d'homogénéisation islamique et turc du pays portait en lui (avec parfois la complicité tacite de l'ambassade d'Allemagne) une politique de « purification ethnique » qu'on qualifiera plus tard de génocide. On ne peut lire ces témoignages qu'à la condition de comprendre que le monde turco-musulman n'obéissait pas au logiciel intellectuel occidental. Et que de ne pas avoir entendu ce massacre annoncé a conduit à ce million et demi de morts qui nous interroge sur la force du panturquisme et de la violence propre à un islam conquérant.

Numéro spécial de la « Revue d’Histoire de la Shoah »

Publié par le Centre de Documentation Juive Contemporaine

Sous la direction de Georges Bensoussan

Comité de coordination : Claire Mouradian, Yves Ternon

Ce numéro spécial de janvier-août 2003 est entièrement consacré à la connaissance et à la reconnaissance du génocide arménien, à l’analyse de ses causes et à ses conséquences démographique, diplomatique, juridique, politique et socio-culturel.

Il s’agit d’un livre capital.

A l’heure où les Etats de l’Union Européenne sont appelés à se prononcer sur la candidature turque à l’Europe, il était en effet absolument essentiel de proposer une analyse en profondeur sur la réalité du génocide des Arméniens, en privilégiant l’approche comparatiste avec d’autres crimes contre l’humanité, comme l’Holocauste du peuple juif. Cet aspect de la connaissance est traité dans une première partie.

La seconde partie, intitulée Reconnaissance, traite du combat à distance que se livrent les deux camps en présence. Il y a d’un côté la Turquie et ses alliés objectifs et d’un autre côté les supporters d’une vision éthique et morale de la vie publique. Depuis 1915, comment a évolué le dossier arménien ? Si les reconnaissances se sont multipliées depuis 1965, elles cachent des attitudes et des motivations très contrastées. Il n’en reste pas moins que la violence de la propagande et des réactions turques est à la mesure des succès « arméniens », c’est-à-dire, brutale, haineuse, négationniste. A cet effet, la Turquie exploite tous les moyens imaginables. Réussira-t-elle dans son entreprise ? L’exemple de la France, largement évoquée dans ce livre, a démontré les vertus de la persévérance et de la détermination. Les succès récents remportés au Canada, en Belgique, en Suisse, les progrès enregistrés aux Etats-Unis prouvent que tout est possible. Israël, allié géopolitique majeur de la Turquie, résiste encore, mais, les actions d’intellectuels courageux comme Auron, Charny ou Yehuda Bauer et Yossi Sarid, modifient peu à peu la donne.

Dans un pareil contexte, ce numéro spécial du Centre de Documentation Juive Contemporaine de Paris, réalisé avec la collaboration de 25 spécialistes (historiens, juristes, politologues, sociologues, professeurs de faculté, cinéastes, etc..), s’impose comme l’un des ouvrages les plus complets sur les génocides arménien et juif en terme de comparaison et de négationnisme.

A lire d’urgence.