AVANT-PROPOSL'édition française des deux volumes de mon Histoire de l'Empire byzantin, publiée en 1928-1929 (Madison-Wisconsin), n'est pas une simple traduction de l'original anglais : c'est une nouvelle édition revue et largement augmentée. Il est tout à fait remarquable et en même temps encourageant de constater combien de nouveaux ouvrages et d'articles sur Byzance ont paru depuis ce temps-là. J'ai fait tout mon possible pour en utiliser ou du moins en noter les plus importants. Plusieurs critiques de l'édition anglaise ont également paru dans différentes revues d'Europe et d'Amérique. Dans l'édition française, j'ai pris en considération les corrections et les suggestions de mes critiques, et je crois que l'édition française est sous plusieurs rapports plus correcte et plus exacte que l'édition anglaise.
Que M. Pierre Brodin et Mlle Anna Bourguina veuillent bien trouver ici l'expression de mes vifs remerciements ; ce sont eux qui ont pris la peine de traduire mes deux volumes en français et ont accompli cette tâche pénible et ingrate avec tant de succès et d'éclat.
J'adresse aussi mes remerciements à M. Picard, mon éditeur, dont le nom est indissolublement lié à tant de publications magnifiques sur l'histoire et l'art byzantins.
Qu'il me soit enfin permis d'exprimer ma profonde reconnaissance à mon cher collègue et ami Charles Diehl, membre de l'Institut, qui a bien voulu rédiger une Préface à l'édition française de mon ouvrage pour le présenter au public français ; et à M. Gabriel Millet qui avec son inépuisable complaisance a mis à notre disposition ses précieuses collections photographiques pour illustrer ces volumes.
A. VASILIEV,
(Madison-Wisconsin. États-Unis.)
PréfaceL'histoire de l'Empire byzantin a été, en ces trente ou quarante dernières années, presque complètement renouvelée. Des documents importants ont été découverts sur plusieurs parties de cette histoire ; des travaux considérables en ont étudié différentes périodes avec le détail scientifique nécessaire. Pourtant il nous manquait une histoire générale de l'Empire byzantin, qui mît à profit ces recherches et qui, bien informée des résultats le plus récemment acquis, exposât de façon complète les destinées et l'évolution de la monarchie des basileis. Les histoires entreprises en Russie par Koulakovski et par F. Ouspenski étaient demeurées inachevées ; la première s'arrêtait en 717, la seconde, -- dans l'état actuel de la publication, - - à la fin du IXe siècle. Les précieux ouvrages de Bury ne s'appliquaient qu'à des périodes relativement courtes de l'histoire byzantine. Et les aperçus généraux que composèrent Gelzer, Jorga, Norman Baynes, et auxquels on m'excusera de joindre le mien, n'étaient que des ouvrages de vulgarisation, point inutiles peut-être, mais certainement de caractère assez sommaire.
Ce fut donc une idée très heureuse qu'eut, en 1917, A. Vasiliev de publier le premier volume d'une Histoire de l'Empire byzantin, --il allait jusqu'en 1081, -qui fut complétée, entre 1923 et 1925, par un second volume, en trois fascicules, qui se terminait à la chute de l'Empire en 1453. Mais cet ouvrage était écrit en russe, une langue que beaucoup de gens, et parmi les byzantinistes même, savent mal ou ignorent en Occident. C'est pour cela que Vasiliev fut fort bien inspiré en donnant en 1928-1929 une traduction anglaise de son livre, qui, en réalité, par le soin qu'apporta l'auteur à revoir, à corriger, à compléter, à mettre au courant le texte russe, était presque une œuvre nouvelle. Et comme, à la traduction française que j'ai le plaisir de présenter au lecteur, Vasiliev a apporté le même soin attentif, on peut dire vraiment que cet ouvrage représente, à la date de 1931, l'état exact et la bibliographie complète de nos connaissances sur l'histoire de Byzance. Et cela seul suffit à en marquer l'importance.
Faut-il ajouter que, par tous ses travaux, Vasiliev était admirablement préparé à écrire un tel livre? Dès 1900-1902, il s'était fait connaître par un ouvrage important, en deux volumes, sur Byzance et les Arabes à l'époque de la dynastie d'Amorium et de celle de Macédoine. Il a publié, d'autre part, avec traduction française, des textes importants, l'Histoire universelle qu'écrivit en arabe, au Xe siècle, Agapius de Menbidj, et le document considérable qu'est l'Histoire de Yahya d'An-tioche (xie siècle). Connaissant, par ailleurs, — tout naturellement, - - la langue russe, et ainsi capable d'utiliser les travaux si considérables publiés en russe sur Byzance, il était mieux placé que beaucoup d'autres pour écrire cette histoire générale qu'il a entreprise, et dont la traduction française paraît aujourd'hui.
Il ne saurait être ici question d'analyser, même brièvement, ces deux volumes. J'en voudrais noter quelques traits seulement. Et d'abord cette introduction, qui forme le premier chapitre, et où est présenté en une cinquantaine de pages, de façon si intéressante et si équitable, le développement des études byzantines depuis Du Cange jusqu'à nos jours, en Occident et en Russie. Je signalerai, d'autre part, les deux longs chapitres qui terminent le tome II, sur l'Empire de Nicée et sur l'époque des Paléologues. Pour d'autres périodes de l'histoire qu'il racontait, Vasiliev rencontrait des guides précieux ; ici, au contraire, pour ces XIIIe, xive et xve siècles, si incomplètement étudiés encore, la tâche était plus laborieuse et plus difficile. C'est un grand service que rend l'Histoire de Vasiliev de mettre en cette époque compliquée un peu d'ordre, de précision et de clarté.
Ce sont aussi bien les qualités qu'on trouve dans tout l'ouvrage, et qui le rendront précieux aux lecteurs même peu familiers avec les choses de Byzance. Et il faut remercier Mlle A. Bourguina et M. P. Brodin d'avoir, par leur excellente traduction, mis ainsi à la disposition du public français, et surtout de nos étudiants d'Université, un livre qui nous manquait, et qui nous apporte de la façon la plus heureuse les résultats les plus récents de la science des études byzantines.
Charles DIEHL