Ce roman a été initialement publié en turc ottoman en 1851 à Constantinople, avec des caractères arméniens.
Le roman pose la question de l'amour impossible entre une jeune fille apostolique arménienne, Akabi, et l'élu de son coeur, Hagop, un jeune Arménien catholique. Le récit (peut-être autobiographique de l'auteur) décrit le vif déchirement mortel de la communauté arménienne rarement pris en compte sous cet aspect social, dans une période de calme apparent avec les autorités ottomanes en ce milieu du XIX siècle. L'auteur démontre et regrette la lutte fratricide entre les deux confessions.
Éditée en 1851, L'histoire d'Akabi a été rédigée en langue turque ottomane avec des caractères arméniens, procédé qui était assez courant à l'époque, peut-être compte tenu de la difficulté de lire les caractères de l'écriture arabe par l'ensemble des sujets de l'Empire. Le turc n'était pas une seconde langue pour les Arméniens, mais une langue... seconde, d'usage permanent, au moins dans la vie courante. Le bilinguisme était quasiment inné. La langue turque véhiculaire orale, était obligatoire dans la vie quotidienne. Toutefois l'apprentissage de l'écriture cursive arabe était réservé aux études spécialisées, les non-musulmans n'y avaient pas facilement accès avant le premier Tanzimat de 1839 dit-on parfois. Le turc écrit avec des caractères arméniens (ou grecs, le karamanli), servait même pour des actes officiels sur papier timbré.
Le lectorat, disons l'auditoire d'Akabi (les textes étaient souvent lus) s'élargissait avec l'usage du turc, même si indéniablement le propos ici est destiné en priorité à l'édification du public arménien de Constantinople.
Parallèlement, Vartanian était mélomane, la musique tient une certaine place dans l'esthétique du roman : musique, violon, clavecin, mélodie, harmonie, symphonie — voire même la notion du silence de la nuit après le brouhaha du jour à Bey oghlou — des mots récurrents, y compris l'audition d'un beyatli, une chanson populaire ottomane.
L'ensemble des écrits de Vartan est très éclectique comme le souligne expertement le professeur Johann Strauss. Akabi, une écriture baroque, parfois à la limite du rococo, telle la tirade de Roupénig (page 46), dans ce qui est un effet de style voulu par l'auteur. On ne s'étonnera pas non plus de la justesse de sa touche pour dépeindre les personnages secondaires. De même on ne peut que remarquer pour un premier roman la mise en scène de l'ensemble, le rythme, la construction, ainsi que la conduite des rebondissements tel un roman policier, tant chaque chapitre par des allusions invite à ne pas lâcher le livre et tient le lecteur en haleine.
Bien que publié anonymement, on sut rapidement que l'auteur n'était autre qu'un certain Hovsèp Vartanian, traducteur en chef au Ministère de la marine impériale. La réception de l'ouvrage fut accueillie avec enthousiasme par la presse naissante à l'époque, et même en France par Édouard Dulaurier, directeur de la section arménienne des Langues'O, dans la vénérable Revue des deux Mondes en 1854. L'éminent critique littéraire de Tiflis, Mikaël Nalbandian, de passage à Constantinople en 1860, ne tarissant pas d'éloges sur les fines analyses sociales en marge de la classique histoire d'amour, souhaitait une traduction en arménien. Après une centaine d'années d'oubli, une fort belle version fut donnée en 1953 par Karnig Stépanian à Erevan.
Il faudra attendre 1991 pour une version turque accessible en caractères latins.