Toute vie n'est qu'un long parcours, une rocambolesque course d'obstacles dont chaque haie risque de vous être fatale. Pendant les premières années de ma carrière, plus d'une fois, j'ai dû faire le gros dos, subir l'averse, accepter les limites de l'acceptable. Mais je ne suis pas le seul dans ce cas. Il fallait que je découvre, que j'apprenne, que je m'impose. Ces longs débuts ne m'ont laissé aucun regret. Ils m'ont enseigné la souffrance et l'espoir, l'effort et le prix de la réussite. J'ai appris à vivre debout.
Et puis, peut-être parce que j'avais franchi en trop bonne place la ligne d'arrivée, on a cherché à m'abattre. Par bien des moyens. Sans raison, mon honneur a été gravement atteint et mon honnêteté remise en cause. Mon succès a été rançonné. Parce que frappée du sceau de l'injustice, cette épreuve m'a plus coûté que toutes mes années de vache enragée.
Avant même que la justice ne me donne raison, grâce à mon bon droit et aux efforts de mon ami, Me René Hayot, ma première source de réconfort a été mon public. Grâce à lui, j'ai retrouvé la force de lutter. Et de vaincre. En me témoignant sa confiance, il m'a offert le plus merveilleux gage d'amitié.
Aujourd'hui, je sais que le contrat n'a pas été rompu et que rien, entre nous, n'a changé.
Le sens de ma vie demeure...
Charles Aznavour
