La communauté arménienne de Paris était depuis le début du XIXème siècle, une réalité. Formée d'industriels, de commerçants, d'étudiants venus du Caucase, de l'Empire ottoman, de Perse, etc... même des Indes, elle réclama bien vite son lieu de culte. En 1902, un correspondant du journal arménien de Constantinople "Manzou-méi Effniar"écrivait : "Quand aurons-nous notre Sainte Église à Paris ?" Cette question ne resta pas sans réponse.
Parmi les fidèles qui assistaient régulièrement aux offices du 20 rue de Vienne, se trouvait Alexandre Mantachiants, le richissime magnat du pétrole de Bakou, le bienfaiteur d'églises, d'écoles, le parrain de 200 étudiants arméniens tels que le poète Siamanto, le chanteur Arménag Chah-Mouradian, le musicologue Komitas... ne pouvait rester sourd à cet appel.
Religieux, profondément patriote, il fut touché par la requête du prêtre qui officiait au 20 de la rue de Vienne : le futur archevêque Vramchabouh Kibarian d'Artchouguents. Alexandre Mantachiants acquit donc, pour le prix astronomique de 450 000 F, un terrain de 800 m2 proche du quartier de sa résidence des Champs-Élysées, où il y séjournait 2 à 3 mois par an. Le choix de l'architecte fut arrêté sur le nom d'un jeune français, Albert Désiré Guilbert (l'église Notre-Dame de la Consolation, œuvre de ce dernier, située au 23 de la rue Jean Goujon ayant fortement impressionné Mantachiants).
Le premier coup de pioche fut donné le 14 juillet 1902. Le 5 octobre suivant fut celui de la pose de la première pierre et en 1904, celle de son achèvement. Au fronton de cette église, longue de 25 m et large de 13 m, on grava symboliquement la 7ème lettre de l'alphabet arménien "£" ("Il existe", référence à Dieu). En dessous, "A la grâce de Dieu, Sous le pontificat à Saintt Etchmiadzine, de Sa Sainteté Meguerditch 1er, Catholicos de tous les Arméniens, le très fidèle Alexandre Mantachiants a fait don sur ses propres deniers, du terrain et de la construction de cette église consacrée à saint Jean Baptiste, en souvenir de ses défunts parents et pour la plus grande satisfaction des enfants de la Sainte Église Apostolique Arménienne". L'ensemble de la construction, église et prélature se chiffra à 1 540 000 F. Le mensuel fondé et publié par Minas Tchéraz d'abord à Londres, puis à Paris, appela les Arméniens, dans son numéro du 1er novembre 1904, à exprimer toute leur joie et leurs remerciements au généreux patriote, Alexandre Mantachiants.