Naissance le 4 février 1878 à Scuttari, Constantinople (Turquie), décès en 1943 en Russie
Comme elle l'indique elle-même au début des "Jardins de Silihdar", Zabel Essayan, Hovhanessian de son nom de jeune fille, était née en 1878 à Scutari (quartier de Constantinople), sur la rive asiatique du Bosphore.
Après ses études primaires et secondaires, elle alla dès l'âge de dix-sept ans, suivre les cours de littérature et de philosophie à la Sorbonne et au Collège de France, et c'est à Paris qu'elle épousa le peintre Tigran Essayan;
En 1895, elle publie son premier poème en prose dans la revue "Tsaghik", puis ce seront des nouvelles, des essais, des articles, des traductions publiées dans le Mercure de France et des périodiques arméniens comme Massis, Anahit, Aravelian Mamoul.
En 1908, elle rentre à Constantinople et publie par la suite "Parmi les ruines", qui a trait aux massacres de Cilicie. En 1915, pour échapper à la déportation et à la mort, elle fuit en Bulgarie et de là au Caucase. Après la guerre, elle collaborera aux travaux de la Délégation de la République arménienne à Paris, puis s'occupera des secours aux réfugiés et aux orphelins dans divers centres du Proche-Orient.
A noter un très beau texte, qu'il est possible de trouver en bibliothèque universitaire, "Le rôle de la femme pendant la guerre", Revue des Etudes Arméniennes, Tome II, année 1922, pages 121 à 138.
En 1926,elle se rend en Arménie soviétique, puis revient en France et livre ses impression dans "Prométhée déchaîné" qui paraît à Marseille en 1928.
C'est en 1933 qu'elle s'installa définitivement en Arménie dont elle acceptait sincèrement le régime politique et l'année suivante elle assista à Moscou au premier congrès des écrivains soviétiques.
Zabel Essayan milita avec zèle au service de l'État soviétique avant de disparaître dans une geôle stalinienne, comme bien des Arméniens soviétisés à Erevan, devenus suspects par leur appartenance originelle. Voir sur ce point Marc Nichanian Writers of Disaster Armentan Literature in the 20th Century, I. The National Revolution, Princeton & London, Gomidas Institute, 2002.
"Les Jardins de Silihdar" parut en 1935. Deux autres volumes devaient suivre, mais en 1937 elle fut victime de la terreur stalinienne et disparut en Sibérie où elle mourut, probablement en 1943.
Revue ANI, les Cahiers arméniens, numéro 5
Biographie résumée, issue de la thèse de Léon Ketcheyan
Femme de lettres née en 1878, Zabel Essayan [= Z.E.] est un personnage marquant de l'histoire arménienne. Étudiante à Paris, elle fréquente les soirées du poète René Ghil, participe à la fondation du Groupe de l'Abbaye dont le noyau (G. Duhamel, Ch. Vildrac, R. Arcos...) s'installe à Créteil, caressant le rêve d'une communauté fraternelle favorisant la création artistique. Pour financer un de leur projet, Z.E. se rend en Égypte où vient d'être fondée la puissante Union Générale Arménienne de Bienfaisance. La révolution des Jeunes-Turcs est suivie du massacre des Arméniens d'Adana, auquel participe l'armée, pourtant venue rétablir " l'ordre ". Envoyée par le Patriarcat arménien pour secourir les victimes, Z.E. écrit Dans les ruines (1911), son œuvre majeure. Le 24 avril 1915, elle figure sur la liste de la célèbre rafle des intellectuels arméniens, mais y échappe. Soucieuse de transcrire les témoignages des rescapés du Génocide arménien, elle contourne le théâtre des opérations militaires pour revenir à Paris, Le partage des zones d'influence au Proche-Orient prévoit que la Cilicie se trouvera en zone française. Mais les accords d'Ankara prévoient son évacuation par les Français. Les Chrétiens doivent partir. Il s'agit surtout d'Arméniens qui vont s'installer au Liban et en Syrie (zones françaises). Z.E. organise l'évacuation des orphelins. A Paris, les anciens de l'Abbaye ont rejoint le groupe Clarté de Barbusse. L'Arménie devient soviétique. R. Ghil et les anciens de l'Abbaye approuvent le nouveau régime. Z.E. se tourne vers le communisme. En 1933, elle s'installe à Erevan, participe en 1934 au Premier congrès des écrivains soviétiques. En 1936, elle prend publiquement la défense d'écrivains persécutés. Z.E. est arrêtée en juin 1937, puis déclarée " ennemi du peuple ". En janv. 1939, elle est condamnée à la passation par les armes ; le 8 mai, la peine est commuée en dix ans de déportation. Elle disparaît dans le Goulag en 1943.
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